Je connais un marin des villes, rêveur de mers et admirant le soleil. Il mit un jour le pied sur un fort joli douze mètres, riche en cordages et poulies, et avisa la grand voile. Elle était bien plus haute que celles qu'il avait connues. Elle était grande, belle, faite de bonne toile, et montrait le chemin du ciel au moins autant qu'elle ferait avancer la coque, dès le chenal franchi, Seine remontée. C'est ce qui arriva, sans doute autant par sa volonté à lui que par sa détermination à elle. Dès lors que la première vaguelette fut en vue, les deux se mirent à n'aspirer qu'au grand air, rêvant de grande mer. La grand voile vibrait. Rayonnante. Mais menaçait aussi de se réduire en cas de fausse manoeuvre. Pour peu on eût dit qu'elle était prête à tourner les talons. C'était une voile libre, autant qu'un humain peut l'être. Et le marin se dit que son métier était bien de libérer la voile, elle qui le libère de sa condition rampante de prisonnier des rives sombres.
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